mttiro
 
 
  Inscrit le: 27 Sep 2011 Messages: 969
 
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				 Posté le: Dim 30 Oct 2011 10:54 pm    Sujet du message: Voyelles chez Pitman, les Hmong, le louchébem | 
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				1) On reproche à la sténographie Pitman le fait suivant. On est censé tracer le sténogramme
 
du mot en combinant les signes constituant le squelette consonnantique (sonore) du mot,
 
puis on ajoute les voyelles après. A cela les Pitmaniens rétorquent qu'un sténographe entraîné
 
peut se contenter justement de la charpente consonnantique, les voyelles ne s'avérant nécessaires
 
que dans certains cas, par exemple pour des noms propres des mots inhabituels.
 
 
2) On a pu comparer cette séquence à ce qui se passe quand on écrit un mot tel que "petit
 
en écriture manuscrite courante, on trace le mot presque entièrement, puis, souvent,
 
on met des points sur les "i" et des barres sur les "t" après avoir terminé le mot. 
 
 
Il y a encore plus étonnant que de pointer et barrer à la fin du tracé du mot, ou de vocaliser
 
retrospectivement. Et si j'étais un Pitmanien, je ferais observer ceci.
 
 
3) Il existe une écriture dans laquelle ce "repentir" est poussé au maximum. Il s'agit de l'écriture
 
inventée en 1959 par un paysan Hmong pour sa langue, le hmong (ou méo, miao), parlé
 
dans le sud de la Chine, et dans la zone Vietnam, Laos, Thaïlande. Il se nommait Shong Lue Yang,
 
et c'était au départ un paysan illettré.
 
 
La langue hmong est une langue "monosyllabique". En simplifiant un petit peu, la syllabe
 
a quasiment toujours une structure simple CV, consonne + voyelle. De plus il y a un ton
 
pris dans un système à sept tons.
 
 
Dans l'écriture, dite Pahawh Hmong, Shong Lue Yang a prévu une série de signes pour la consonne initiale,
 
et une autre série de signes pour la voyelle + le ton. Mais on va voir que leur combinaison est paradoxale.
 
 
En effet pour ce qui est des séquences de mouvements, cette écriture se trace de la manière suivante.
 
1) On écrit en lignes de gauche à droite, de haut en bas, comme du français.
 
2) Chaque mot est constitué de deux signes, comme on l'a vu, mais dans un mot, l'ordre est renversé
 
dans l'écriture. On écrit en premier le signe notant voyelle + ton (élément final de la syllabe /mot),
 
et ensuite le signe notant la consonne initiale. Mais bien entendu, on prononce dans l'ordre voulu, inverse de ce qu'on note.
 
 
Imaginons bien ce que ça veut dire. Supposons que nous écrivions un français simple dans un système
 
de type Pahawh Hmong.
 
 
Je prends la petite phrase "Tous les gars rient". On pourrait la noter ainsi :
 
tou lé ga ri
 
 
Maintenant, on va suivre la technique de Shong Lue Yang. On dissocie chaque mot en ses deux éléments,
 
puis on les permute :
 
tou > t + ou > ou + t
 
lé > l + é > é + l
 
ga > g + a > a + g
 
ri > r + i > i + r
 
 
On va donc finir par écrire ceci : 
 
 
out él ag ir
 
 
Vous noterez que, graphiquement, c'est un peu l'équivalent d'un louchébem simplifié. C'est comme si
 
je partais de "boucher" /buSe/ > /uSeb/ sans ajouter le "-em" final. Sauf que, dans le louchébem,
 
la permutation se fait à l'oral, tandis que dans le Pahawh Hmong, elle se fait à l'écrit mais évidemment pas
 
à l'oral. Comme si on écrivait en louchébem tout en prononçant en français normal. Un français louchébémo-hmongifié
 
ferait écrire "ouchéb", mais dirait /buSe/. Rigolo, non ?
 
 
Pitman, à côté...
 
 
 
http://www.omniglot.com/writing/hmong.htm
 
http://en.wikipedia.org/wiki/Pahawh_Hmong
 
http://aleph2at.free.fr/index.php?art=1355
 
http://en.wikipedia.org/wiki/Shong_Lue_Yang
 
http://hmonglessons.com/the-hmong/hmong-leaders/shong-lue-yang-soob-lwj-yaj/
 
http://en.wikipedia.org/wiki/Miao_people
 
 
http://fr.wikipedia.org/wiki/Louchébem
 
http://monsu.desiderio.free.fr/curiosites/largonji.html
 
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pig_latin
 
 
Comme quelqu'un le fait observer dans la discussion de l'article de Wikipedia sur le louchébem,
 
"loufoque" < "fou" était connu bien avant l'humoriste Pierre Dac (lui-même éminemment loufoque, il est vrai) :
 
attesté en 1873,  chez Verlaine en 1886, Octave Mirbeau en 1900, Paul Bourget en 1925,
 
et "louftingue" chez Courteline 1917. | 
			 
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